Cancer de prostate et pesticides

Une étude de l’ANSES parue en juillet 2021 reconnaît un lien entre exposition aux pesticides et cancer de la prostate. Cette étude va servir de support à la reconnaissance de ce cancer comme maladie professionnelle pour les agriculteurs français, comme l’a annoncé le 20 octobre le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie.

Chirprost

Selon le Pr Mongiat-Artus, « L’imputabilité de l’exposition professionnelle aux pesticides dans le cancer de la prostate reste particulièrement délicate, tout particulièrement concernant la chlordécone. » Tout d’abord, il existe aux Antilles la plus forte incidence mondiale de cancer de la prostate. Cela est expliqué par la concordance du patrimoine génétique d’origine africaine de la plus grande partie de la population et de la facilité d’accès aux soins dans ces îles.

L’usage de la chlordécone aux Antilles n’a, malheureusement, pas uniquement concerné les travailleurs des bananeraies ; tous les territoires sont concernés, sol et eaux exposant l’ensemble de la population à ce pesticide. Enfin, le dosage sanguin de la chlordécone ne reflète pas correctement l’imprégnation d’un individu, car la molécule est stockée dans le tissu adipeux. « Nous pouvons avancer qu’aux Antilles, il y a une superposition de l’incidence du cancer de la prostate et de l’exposition de toute la population au chlordécone ».
De plus, la chlordécone a un effet « œstrogènes-like ». Celui-ci est responsable d’une augmentation de la sensibilité et de la spécificité du dosage du PSA comme outil de dépistage du cancer de la prostate. Les urologues reconnaîtront cette situation qui peut être comparée à ce qui est observé lors de la prescription d’un inhibiteur de la 5-alpha-réductase. Ainsi chez les patients exposés de façon chronique à la chlordécone, une augmentation du PSA conduira plus souvent au diagnostic de cancer de la prostate que dans une population qui n’y est pas exposée, au moins du fait de la meilleure « rentabilité » de la détection de la maladie. Cet aspect n’a pas été pris en compte dans les rapports établis par l’INSERM et l’ANSES, mais l’a été par le rapport conduit par l’Institut national de médecine agricole sur saisine du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Il existe donc bien une corrélation entre chlordécone et cancer de la prostate, mais celle-ci est établie à ce jour uniquement avec le diagnostic de cancer de la prostate et non pas la carcinogénèse prostatique. Il existe des hypothèses et des éléments biologiques de laboratoire à l’appui d’une responsabilité de la chlordécone dans cette carcinogénèse, mais la preuve reste à produire. C’est ce que va explorer un PHRC conduit par les professeurs Cussenot et Fromont.
Ainsi, on ne peut que se réjouir de l’attention portée non seulement aux maladies professionnelles, en l’occurrence au cancer, dont les déclarations sont encore bien trop rares. On peut aussi se réjouir de l’attention portée à la lutte contre le cancer de la prostate, tout particulièrement aux Antilles où les Français lui payent un très lourd tribut.


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